samedi 7 mars 2015

Interviews

DAN 23

Comment en êtes-vous arrivé à faire du Street Art ?
J'ai découvert le graffiti quand j'avais 12 ans, quand le Hip-Hop est arrivé en France en 1984. L'énergie du Hip-Hop était plus sympa que toutes les autres choses qu'on nous proposait à l'époque, alors forcément je m'y suis intéressé et j'ai commencé à faire des portraits, à peindre sur les murs.

Faites-vous passer un message à travers vos œuvres ?
Au début, non, je faisais seulement des portraits de musiciens que j'appréciais ou des portraits de mes proches. Mais depuis deux ans, j'essaye de faire passer un message. Récemment j'ai fait toute une thématique autour des yeux, qui voulait dire : ne croit pas tout ce que disent les médias, recherche par toi-même, fais toi ta propre opinion. On vit à l’ère d’internet, c’est une chance unique pour développer sa propre opinion.


Images prises par nous mêmes dans son atelier.


Vous peignez souvent en jaune, violet, rouge ou encore bleu, pourquoi avoir choisi ces couleurs ?
C'est pareil c'est lié à la musique, j'écoute énormément de musique black : soul, funk, jazz, hip-hop... Elles représentent des couleurs extrêmement chaudes, donc j'ai repris ces codes couleurs.


Préférez-vous exposer vos œuvres dans des galeries d'art ou peindre dans la rue ?
Je préfère peindre dans la rue, ce n'est pas du tout la même démarche, dans la rue tu dois t'adapter au support alors qu'en galerie tu peins sur une toile, c'est fermé. Dans la rue selon sur quoi tu peins, cela fera partie intégrante du graffisme de ton œuvre. La peinture respire beaucoup plus car il y a un cadre autour, puis tout simplement car les gens ne vont pas dans des galeries la plupart du temps, ça me permet donc de montrer mes œuvres à un plus grand nombre de personnes.

Quand on vous propose un projet, comme la fresque à Rivétoile ou le festival Djerbahood, est-ce qu'on vous laisse libre choix sur le sujet ?
Cela dépend, à Djerba comme c'est un pays étranger, tu présentes des avants-projet, tu parles avec les gens de là-bas pour trouver une idée pertinente et qui va susciter le débat, l’idée se construit dans l’échange.
Mais pour Rivétoile, j'ai vraiment fait ce que je voulais.



Images prises nous mêmes à Rivétoile

Quand vous peignez dans la rue, est-ce que vous choisissez à l'avance le mur sur lequel vous allez peindre ?
Oui, souvent je circule, je regarde, je ne vais pas peindre sur un mur blanc, ça ne m’intéresse pas. Un propriétaire n'a pas forcément envie que je lui bousille son mur avec ma peinture donc j'essaye de chercher des murs dégradés ou laissés à l'abandon.

Avez-vous déjà eu des problèmes avec la police ?
Oui souvent, mais comme je choisis des murs abandonnés, que je peins des portraits pas juste des tags, qu'en plus je peins en plein jour, je leur explique ma démarche et donc pénalement ils ne peuvent pas faire grand chose contre moi. Mais des fois ils n'ont pas le choix, s'il y a eu une plainte. Si le propriétaire du mur à laissé son mur à l'abandon et qu'il pose une plainte contre moi, je réponds qu'il peut aussi porter plainte contre ceux qui ont collé des affiches ou dégradé son mur avant moi.

Vous peigniez donc le jour ?
Oui la lumière du jour et plus agréable, en plus la nuit il fait froid !

Récemment nous avons vu un film « Vandal », les personnages principaux eux peignaient la nuit.
Car justement eux, ce sont des vandals, leur but est de défoncer les murs, et non pas forcément une recherche esthétique. Moi je fais la démarche inverse, je ne cherche pas à vandaliser mais plutôt à redonner du sens et de la beauté à des murs abandonnés en réalisant des portraits pour être accessible à tous. Mais l’esprit vandal fait partie de la culture street art, c’est une des branches.

Gagnez-vous votre vie grâce au street art ?
Oui oui, je ne fais que ça.

Considérez-vous vos œuvres de rue comme des œuvres éphémères ?
Oui bien sûr, c'est le but, si des gens veulent détruire mon œuvre, ils le font.

Votre définition du street art ?
Pour moi je pars du principe que tout artiste ou tout musicien devrait aller dans la rue et faire des trucs gratuits. Mais on vit dans une société où tout ce monnaye, faire quelque chose gratuitement n'a pas de sens. Pour moi, tu te dois de faire ce type de démarche. Le street art c'est donc ce que tout artiste devrait mettre en oeuvre, montrer ce qu'il sait faire dans la rue, c’est une manière d’être acteur de sa ville, de se l’approprier.


STOUL

Comment en êtes-vous arrivé à cet art ?
Depuis toute petite je voulais exercer le métier d'artiste peintre. J'ai fait des études d'art à l'école Boulle où j'ai appris à travailler le métal. A la fin de mes études j'ai commencé à m'installer dans des squattes d'artistes où je croisais fréquemment des graffeurs et des street artistes au début des années 2000. En 2006 j'ai rencontré mon mari qui est graffeur, il m'a aidé à maîtriser la bombe de peinture, un outil qui m'a beaucoup intéressé.

Faites-vous des croquis avant de peindre dans la rue ?
Cela dépend, mais la plupart du temps quand je trouve un endroit par hasard, quand je suis en déplacement, j'ai tendance à reproduire des dessins que j'ai déjà réalisé en les modifiant.

Avez-vous un atelier ?
Oui, c'est important d'avoir un endroit dédié entièrement à mon travail. Dans mon atelier je peins et prépare mes projets, j'y reçois aussi mes partenaires et les personnes qui souhaitent me rencontrer en dehors des événements.

Comment choisissez-vous les endroits où vous peignez ?
Je peins le plus souvent dans des friches industrielles ou dans des lieux abandonnés, connus par mon crew les 7MR, qui sont composés de graffeurs vandals. D'autres fois je prend des photos à l'avance de l'endroit que j'ai choisi ou je peins directement dans un endroit trouvé par hasard.

Vous exposez aussi dans des galeries d'art, préférez-vous la rue ?
C'est impossible pour moi de choisir. Dans la rue j'ai pu me faire connaître, exposer mes oeuvres aux yeux de tous, mais cela reste gratuit, je n'y gagne pas ma vie. Dans les galeries je vends mes tableaux, l'un et l'autre sont complémentaires.

Faites-vous passer un message à travers vos œuvres ?
Oui, la féminité, la beauté des femmes. En tant que femme je montre également que nous sommes fortes et que nous arrivons à faire pleins de choses.

Peinture de Stoul

Avez-vous eu du mal à vous intégrer dans ce milieu comme la majorité des street artistes sont des hommes ?
Non, pas du tout, même si nous sommes moins nombreuses, j'ai de très bon rapport avec mes confrères.

Avez-vous déjà eu des problèmes avec la police suite à des peintures urbaines?
Oui, maintenant j'essaye d'avoir des autorisations afin d'éviter au maximum les problèmes, mais ce n'est pas toujours évident...

Pourquoi avez vous choisi de ne pas rester dans l'anonymat ?
Car avant de commencer à faire du street-art j'avais déjà des photos de moi sur internet, alors si on voulait connaître mon identité, en cherchant bien on la trouvait, ce ne serait donc pas logique de me cacher maintenant.

Considérez-vous vos œuvres comme éphémères ?
Oui bien sûr, je sais que quelques minutes plus tard un graffeur peut très bien venir et recouvrir mon œuvre ou le propriétaire du mur peut venir l'effacer.

Est-ce que ça vous dérange quand d'autres street artistes viennent peindre au-dessus de vos œuvres ?
Cela dépend, si c'est un tag, un graffiti peint en plein milieu de mon œuvre, oui ça me dérange, mais si c'est une œuvre qui recouvre entièrement la mienne, c'est le jeu. Après si je me suis cassée la tête à chercher un bon spot ça m'énerverait de voir ma peinture recouverte.

Votre définition du street art ?
Je le définirais comme un mouvement artistique contemporain qui fait parti de l'art urbain. Une catégorie d'art qui recouvre beaucoup de domaines dont le street art. Les street artistes sont majoritairement des artistes qui, selon moi, peignent dans la rue, en recherche de notoriété, pour donner de la valeur à leur travail d'atelier, avec Internet en prime, la rue est l'un des meilleurs moyens pour communiquer au plus grand nombre. Mais je ne réduis pas la démarche à ce seul leitmotiv, il y aussi la revendication, le partage, l'humour, l'esthétisme et beaucoup d'autres motivations. Les Street Artistes prennent beaucoup de risques légalement et physiquement pour offrir leur œuvres. Avant tout, je dirais que le street art c'est une liberté d'expression Démocratique.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire