samedi 7 mars 2015

III-... Mais un art qui fait encore polémique

A) Une image sociale négative

Mise à part les problèmes avec la législation, les tags font toujours polémique du côté de la population. Nous avons pu constater à travers notre sondage qu'une majorité n'est pas contre cette forme d'art, mais il reste encore beaucoup de personnes s'y opposant.

Toujours grâce à notre sondage, nous avons eu l'opportunité de ne pas seulement poser notre question, mais de pouvoir discuter avec les personnes de la raison pour laquelle leur avis était favorable ou non. Certaines personnes nous disaient qu'elles n'avaient rien contre les œuvres recherchées artistiquement, « jolies », même si la beauté reste subjective, mais que les écritures n'était pas tolérable, inutile.
Si certaines personnes voient la différence entre les gribouillages (insultes...) et les graffitis, d'autres on tendance à « tout mettre dans le même sac ». C'est en partie pour cela que les street artistes voulant réaliser une « vraie oeuvre » ont souvent du mal à expliquer leur démarche au sein de la population, et à se faire comprendre.


Le street art est largement assimilé à la classe sociale « basse » de la société. Par exemple, dans le film « Vandal » de Hélier Cisterne que nous avons déjà évoqué, le personnage principal, Chérif, est un jeune solitaire. Il est issu d'une classe sociale plutôt basse, et sa mère a un salaire peu élevé. Son travail avec son oncle, en maçonnerie, est également classé, selon le cliché, dans une classe sociale basse. Son adhésion au street art dans un groupe de jeunes cagoulés travaillant la nuit illégalement est une accentuation de ce côté rebelle qui le caractérise durant tout le film. Le jeune trouve un refuge dans cet art enivrant car interdit, et lui apporte quelque chose de nouveau dans sa vie monotone. 

B) Des messages dérangeants

Comme nous l’avons dit plus haut, le street art a la particularité de véhiculer des messages, qu’ils soient politiques, sociaux ou religieux. En effet, depuis que l’art de rue s’est répandu dans le monde entier, on trouve partout sur les murs des œuvres destinées à parler à tous. Chacun est concerné par ces grands thèmes, et la rue est le meilleur endroit où toucher le plus de personnes.

1) Des messages politiques


Oeuvre de Mogul, à Stockholm

En juillet 2014, selon Art Media Agency, Barack Obama se rendait à Los Angeles dans le cadre de la remise de la National Medal of Arts, quelques jours après que Shonda Rhimes, la célèbre créatrice de la série Scandal ait organisé une réception invitant le président américain et quelques hauts sympathisants afin de récolter des fonds pour le parti démocrate. Certains ont payé leur place entre 1000 et 32 400 dollars. Un ou plusieurs street-artistes de Los Angeles ont alors produit une série d’affiches placardées partout dans la ville, sur les bancs, les poubelles, les compteurs électriques, sur laquelle apparaît le président américain en noir et blanc, et au-dessus de lui écrit en lettres rouges « SCANDALS ». L’arrière-plan de l’image est composé de mots liés aux grandes polémiques auxquelles ont fait face les Etats-Unis récemment, comme Lybie, Syrie, invasion ou encore NSA (National Security Agency). Ces affiches qu’on pourrait qualifier d’anti-Obama sont des messages clairs en défaveur du président, des reproches et des rancunes qui lui sont directement adressés. Ce sont donc des messages politiques, lesquels touchent tout aussi directement la population des rues américaines, qui la fait réfléchir, et qui remet ainsi en question la légitimé de Barack Obama.

Un banc de Los Angeles utilisé pour la campagne d’affiches en 2014
Ainsi, la ville est utilisée comme toile pour faire passer des messages qui dénoncent et qui mettent mal à l’aise, surtout lorsqu’ils évidents et visibles comme ici.
2) Des messages sociaux

Fresque de Mr Thoms à Ferentino, en Italie
Le street art est, en plus d’un art pour le plaisir des yeux, un moyen de communication, permettant la réflexion et une opinion personnelle des passants. C’est cela que cherchent le plus souvent les œuvres qui véhiculent des messages relevant du domaine social. C’est le cas de l’œuvre de Paulo Ito, au Brésil, qui dénonce les sommes faramineuses dépensées pour le Mondial de Football de 2014, alors que la population brésilienne est très pauvre, manque de logements et de nourriture.


Œuvre de Paulo Ito, peinte sur le mur d’une école de Sao Paulo, 2014

L’œuvre de Sao Paulo a été partagée plus de 50 000 fois sur facebook. Elle dénonce clairement l’injustice qui règne au Brésil, où le sport a pris plus d’importance que la survie des êtres humains du pays. On entre dans la controverse, dans la polémique. L’artiste dit avec sa peinture tout haut ce que les autres pensent tout bas, là où la voix de la population n’a aucun impact sur la façon de fonctionner de ses dirigeants. C’est, encore une fois, une invitation à la réflexion. C’est un message qui accuse, et donc un message qui dérange. Le street artiste porte un regard sur la société qui l’entoure et la « juge » en quelques sortes par son art.

3) Des messages liés à la religion


Oeuvre de Banksy, « Jesus Christ with shopping bags »

Néanmoins on trouve sur les murs convertis au street art toutes sortes de messages, et dans bien des domaines. Ainsi les idées liées à la religion y trouvent elles aussi leur place. Nous prendrons comme exemple l’œuvre de Combo, street artiste parisien. Composée d’une affiche et d’un tag, elle invite à une entente pacifique entre les différentes religions, et utilise pour cela les symboles des trois grandes religions monothéistes, l’islam, le judaïsme, et le christianisme.


Œuvre de Combo, à Paris, 2015

Selon FranceTV info, cette même invitation a conduit à une agression, le 30 janvier 2015, de la part de 4 jeunes envers l’artiste, après son refus d’effacer son travail. Une fois encore, le message dérange. Les désaccords au sein de la société ne permettent pas l’adhésion de tous à l’idée véhiculée, elle amène donc à une tension qui, ici, se traduit par la violence. Néanmoins cette tension, présente à chaque message dérangeant donné par les street artistes, peut amener, plus simplement, à la destruction de l’œuvre, ce qui nous ramène donc à l’idée que le street art n’est pas totalement accepté.
Au final, nous pouvons constater que les difficultés pour l’art de rue à s’intégrer ne sont pas dues qu’au fait qu’il est jugé comme dégradant la ville, mais également, voire surtout pour certains travaux, parce qu’il dénonce le système sociétal. En effet, dans le monde du street art, toutes les œuvres ne sont pas uniquement faites pour embellir la ville. Certaines sont produites afin de remettre en question une idée, ou afin de dénoncer un système. Elles sont donc sujettes à décrédibiliser, à remettre en question. C’est aussi en raison cette facette de juge et d’accusateur que le street art a tant de mal à s’intégrer comme un art véritable.

C) Les street artistes qui rencontrent des problèmes avec la police

Thoma Vuille, 37 ans, plus connu sous le nom de Monsieur Chat, est un street artiste franco-suisse, avance sur un fil fragile entre marginalité et marketing, illégalité et légalité. Créateur de la série graphique de M. Chat personnage félin souriant crée dans les rues d'Orléans dans une démarche alliant optimisme et culture de proximité.
Ce chat a été dessiné par une petite fille lors d'un atelier qu'il donnait dans une école élémentaire. Le dessin du chat vert lui a tout de suite plut, car il dégage un image très positive, qu'il a ensuite peaufiné. « Elle est ma muse en quelque sorte ». Le chat est alors devenu jaune, et a été peint pour la première fois à l’acrylique par Thoma Vuille sur un mur dans la ville d'Orléans, en 1997. Par la suite il continué à exposer ses chats jaunes de manières illégal dans la ville, mais grâce a la notoriété qu'il a acquise, il a créer de nombreux partenariats avec la ville de Paris notamment et a réaliser un M. Chat d'une taille incroyable au sol sur l'Esplanade du centre Pompidou. Le graffeur expose également à l'étranger par exemple en Espagne, à Cuba, au Vietnam, à São Paolo, et vends également des produits dérivées en Corée du Sud , comme des chaussures estampillées M. Chat. Thoma Vuille ne graffe plus uniquement dans la rue, mais certaines œuvres sont aussi vendues au enchère chez Artcurial (qui est la première maison française de ventes aux enchères)
Dans un article paru dans le monde le 2 janvier 2015, il nous explique que c'est grâce au graffiti qu'il à réussi à échapper à la délinquance. A l'adolescence il ne savait pas quoi faire et redoublait années après années dans un lycée technique. C'est d'ailleurs grâce au métier de son père, maçon, qu'il a décider de continuer, à sa manière, sur les toits et dans les endroits impraticables d'étaler son identité et d'afficher les chats jaunes aux sourires.

Esplanade du centre Pompidou, Paris

Depuis quelques années il n'a plus a caché son identité par peur des poursuites, grâce à la notoriété qu'il a acquit avec la grande diffusion de ses œuvres et l'accueil positif du public
Mais il fait tout de même parti des artistes qui ont eu des problèmes avec la justice, et notamment récemment avec la RATP. Cette dernière réclame une amende de 1800 euros pour les dommages et intérêts pour les ''dégradations'' qu'il a causé dans la station de métro de Chatelet à Paris.
Mais le célèbre street artiste refuse de payer cette somme, estimant qu'il est victime d'une injustice : « Je ne suis pas quelqu'un de malveillant, assure l'artiste. Je respecte les gens et les lieux où je peins. Je suis passé plusieurs fois à Châtelet il y a trois mois alors que les travaux commençaient. J'ai trouvé les murs gris tristes et de toute façon, je savais qu'ils allaient recouvrir mes graffitis par du carrelage », a-t-il déclaré au Figaro le 2 septembre.
Le graffeur se défend donc d'essayer d’embellir les murs pour un court moment et non de les détériorer ou de les abîmer. La société de la RATP ne l'entends pas de cette oreille et a conduit l'artiste devant le tribunal correctionel de Paris le 29 octobre dernier. Ce jugement c'est finalement très vite terminé, juste le temps à l'avocate de Thoma Vuille de déposer une demande en nullité accepté par le tribunal. Cette demande a été formulé suite à la découverte de l'avocate que les articles de loi visés par la RATP avaient été abrogés. Maitre Tricoire, son avocate (passionnée dans la défense des artistes et de la liberté d'expression) aurait aimé plaidé le fond, mais elle n'en a pas eu le temps.
L'artiste disposait également d'un soutien de poids, le maire du XIIIème arrondissement de Paris, Jérôme Coumet, qui lui a autorisé un mur pour un fresque, et le maire de la ville d'Orléans, la ville des débuts de Thoma Vuille . Le maire d'Orléans déclare d'ailleurs que « Thoma Chat, est un homme dont on a besoin pour modifier notre relation à ce qui nous entoure »
Une pétition adressée à la RATP a aussi été lancée sur Internet pour défendre la créativité de l'artiste, qui recueille actuellement plus de 6 000 signataires, dont plusieurs élus parisien, qui ont affiché publiquement leurs soutien au street artiste.


Métro de Châtelet


CITATION :
- «  je suis passé du graffiti qui opère dans la transgression des lois au street art qui s'affranchit du graffiti pour joindre la tradition des muralistes. Par ailleurs, avec l'explosion de la bulle Internet, il n'est plus question de faire un graffiti dans son coin. La diffusion et la médiatisation sont immédiates. Ce qui entraîne une professionnalisation. En ce qui me concerne, celle-ci va avec la maturation. Mais elle ne plaît évidemment pas pas toujours aux puristes qui continuent à revendiquer un art transgressif »

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